Vos questions sur l’écriture et le métier d’auteur : cinquième round !

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Et allons-y donc pour cette dernière séance questions/réponses avant les vacances du blog, qui reprendra ses activités vers le 24 août !

Je ne sais pas si ça entre dans le type de questions que tu attends mais ma dernière question serait : As-tu déjà vécu le monstrueux virus du « J’écris mais rien ne me satisfait et du coup, je tourne en rond pour réécrire 50 fois un passage et je n’avance pas » ? Si oui, tu l’as vaincu ? Comment ?

Pas vraiment. Ce syndrôme-là, je le vis plutôt avant la rédaction, quand les idées se mettent en place dans ma tête et que je vois se dessiner peu à peu l’intrigue générale. Perso, je fonctionne de cette manière – autant les plans et autres synopsis pré-rédactionnels me sont inutiles en général (et disons-le clairement, les rédiger m’ennuie), autant je ne me lancerai pas sans avoir une idée générale claire de mon intrigue (tout au moins la fin & le début). C’est là que les choses peuvent se corser, car avoir une Muse hyperactive n’est pas toujours facile.

Ce que je fais – recette qui n’engage que moi, bien entendu – je me focalise sur mon histoire, mes personnages, les thèmes que je veux exploiter dans mon histoire et de les articuler ensemble de manière logique. Structurer une histoire revient souvent, dans mon imagination, à reconstituer les pièces d’un puzzle. Bien qu’heureusement pour moi, l’écriture offre beaucoup plus de flexibilité qu’un puzzle !

Je vois parfois passer des réflexions où les auteurs parlent de « plantage » et « d’erreurs ». Personnellement, je ne considère pas qu’on peut se « planter » en écrivant son histoire. Que vous empruntiez une impasse par erreur, OK. Que votre histoire ne ressemble pas du tout à celle qui était prévue au départ, c’est aussi probable. Mais, de grâce, dédramatisons tout cela ! Passer du temps avec ses personnages, son histoire, apprendre à les connaître… Tout cela favorise le développement de votre écriture et de vos idées.

Pour ma part, j’en viens souvent – disons même toujours ! – dans mes secondes et troisièmes, etc versions d’un roman, à ne me servir que peut-être de 5, max. 10 % de la première version. Pourquoi ? Parce que la vision que j’ai de mon histoire a évolué, mes personnages aussi. Pour autant, ma première version ne se résume pas à du temps perdu.

Pour revenir à la question, comment passer outre un blocage d’écriture ?

Je ne vais pas avoir de recettes miracles, mis à part le fait de continuer à écrire, coûte que coûte. Si vous savez que vous relire à ce stade va vous décourager d’office, ne le faites pas! Il sera toujours temps, quand votre première version sera écrite, de la relire et de l’éditer.

Vous ne pouvez vraiment pas vous en empêcher ? Analysez ce qui coince : la manière de présenter vos personnages, de débuter votre histoire ? Votre style ? Les dialogues sonnent faux ?

S’il s’agit du premier cas, prenez le temps de vous poser. Accordez-vous un délai de réflexion – bien sûr, si vous vous trouvez en plein NaNoWriMo, ceci peut-être ennuyant. Mais quelque part, votre histoire en bénéficiera. Lâchez la bride à votre imagination, explorez les hypothèses les plus folles. Parlez-en à des lecteurs/amis/bêta-lecteurs si cela peut vous être utile. Ensuite, fixez-vous une date limite pour cette réflexion. Etablissez une feuille de route – même sommaire.

Dans le deuxième cas, pour le style & les dialogues, là aussi, il n’existe pas de recette miracle. D’une part : lisez. Et lisez encore – des traductions aussi bien que des oeuvres d’auteurs francophones. Lisez en dehors de vos genres habituels, lisez de tout. La curiosité, dans ce cas-là, n’a rien d’un vilain défaut. D’autre part : écrivez. Ecrivez encore et encore, que vous le faites à porte fermée – sans aucun regard extérieur – ou non.

Enfin, si vous voulez de la motivation supplémentaire, participez à des challenges. J’ai déjà parlé du NaNoWriMo plus tôt, mais des challenges plus « modestes » existent aussi. Et pourquoi ne pas vous organiser des word wars (comprenez des défis où celui qui écrit le plus grand nombre de mots a gagné) avec des amis écrivains ? L’important, c’est que vous y participiez !

Il est temps à présent de clore ce dernier post ! Si vous avez des questions à ce sujet, n’hésitez pas à les laisser en commentaire, j’y reviendrai en temps voulu ! Je vous souhaite à tous et toutes un excellent été livresque, avec plein de belles découvertes à la clef. A bientôt 🙂

Liste de lecture spéciale été

Comme vous avez pu le constater, je n’ai plus posté récemment de chroniques lecture, excepté dans le cadre d’une interview d’auteur. Moitié par paresse – je suis une grande flemmarde, même si certain(e)s ne me croient pas…- moitié car établir des listes thématiques quand l’occasion se présente, comme c’est le cas ici, me plaît beaucoup plus !

Vous êtes prêts ? Let’s go !

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Commençons par un titre VO qui fleure bon l’été, à savoir Three Day Summer de Sarvenaz Tash. Et pas n’importe quel été, puisque ce roman retrace le parcours de deux ados, un festivalier et une infirmière volontaire, en plein Woodstock! Je ne sais pas vous, mais moi, j’ai rarement croisé cette période en YA ! Vous voulez du rock n’ roll, une jolie romance et une furieuse envie d’écouter du Jimi Hendrix ? Ce roman est pour vous !

latour

J’en parlais hier, donc si vous avez manqué cet article, laissez-moi vous faire un topo : vous voulez frissonner ? Vous aimez les personnages dont on ne sait pas que penser, qui vous fascinent complètement dès la première page ? Plongez donc dans la Tour, une novella oppressante et à la fois libératrice – vous comprendrez ce que je veux dire 😉 – par Cécile Duquenne ! Et pour les réfractaires au numérique, sachez que la version papier arrive bientôt 🙂

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Attention, OLNI (Objet Littéraire Non Identifié – et c’est tant mieux) en approche ! Ce roman fait le buzz même avant sa sortie et nul doute qu’il arrivera bientôt chez nous en VF… Aaron Santo vit dans le Bronx, dans un appartement avec sa mère et son frère aîné, tous deux travaillant double depuis que leur père s’est suicidé dans la salle de bains. Heureusement, Aaron peut compter sur le soutien de sa copine, Geneviève, et de ses amis d’enfance. Mais l’arrivée d’un nouveau locataire, Thomas, dans leur immeuble, va tout bouleverser.

Vous pensez que ce roman est une « simple » histoire d’amour LGBT ? Franchement, vous êtes à mille lieues de ce qu’est réellement More Happy Than Not. C’est un roman qui commence doucement, et ce rythme convient parfaitement à la voix d’Aaron. Vous ne vous attendez certainement pas à ce qui va suivre – moi non plus, d’ailleurs ! J’ai été complètement surprise, voire bouleversée par ce qui arrive. C’est en tout cas une superbe réflexion sur le courage, l’acceptation de soi et l’amour sous toutes ses formes. A lire – et prenez des mouchoirs à côté de vous !

fanny_charlotte_bousquet

Une romance atypique et surtout le formidable parcours d’une jeune femme déterminée à suivre sa carrière d’actrice, voilà ce que nous offre Charlotte Bousquet avec Fanny. Fanny revient en France après avoir tenté sa chance aux Etats-Unis, décidée à décrocher le rôle dont elle rêve. Elle n’a certainement pas anticipé l’appel au secours d’une amie, ni même qu’elle devra affronter de vieux démons… J’ai beaucoup aimé ce roman, tout en justesse et en sensibilité, et servi par la superbe plume de Charlotte.

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Fini hier et je peux vous dire que ce roman m’a secoué ! The Manifesto on How to be Interesting – pas de VF à ma connaissance – retrace le parcours de Bree, dix-sept ans, une ado mal dans sa peau et déterminée à devenir écrivain. Mais après une nouvelle vague de refus pour son second roman et une discussion plus qu’alcoolisée avec son meilleur ami, Bree décide d’ouvrir un blog. Le but ? Y relater toutes les nouvelles expériences qu’elle est bien décidée à vivre…

C’est un roman qui vous secoue, qui vous fait rire aussi tout en abordant des thèmes qu’on a tous vécus adolescent – le harcèlement, la sensation de ne pas être à sa place, la jalousie envers les élèves « populaires », la volonté de changer. Il m’a renvoyé direct dans mon adolescence, où je ressemblais pas mal à Bree et j’ai été touchée par le parcours de cette jeune femme, qui se métamorphose… Pour le pire ou le meilleur ? Je vous laisse découvrir… Un roman et une auteur assurément à suivre !

pirates

Vous aimez de l’action, de l’aventure et chanter des airs de piraterie ? Ne cherchez pas plus loin, Les Pirates de l’Escroc-Griffe sont prêts à vous accueillir à bord ! C’est à une aventure palpitante, virevoltante et aussi sacrément pétaradante que Jean-Sébastien Guillermou, auteur à l’imagination débordante, vous convie avec ce premier tome, paru dans la collection Snark de Bragelonne (numérique + impression à la demande). Vous voulez en savoir plus ? Lisez donc l’interview de l’auteur ! 

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Et on va finir enfin sur un dyptique VO de Dahlia Adler, Behind the Scenes & Under the Lights, dont chaque tome peut se lire indépendamment (pour preuve, j’ai commencé par le deuxième…). Une auteur que j’ai découverte via Twitter, comme d’habitude, et qui m’a interpellé par son franc-parler et son humour, deux traits que l’on retrouve dans cette très chouette saga, qui suit deux meilleures potes, l’une, une étudiante modèle qui rêve d’intégrer l’unif de Columbia, l’autre, une actrice d’origine coréenne, qui est bien déterminée à tracer sa route à Hollywood. C’est frais, fun, romantique sans être guimauve et ça se dévore délicieusement bien !

Et voici pour mes suggestions de lecture ! N’hésitez pas à partager les vôtres 😉 Je vous souhaite en tout cas un super été comblé d’émotions livresques en tout genre… et on se retrouve lundi pour le dernier post de ce blog avant les vacances !

La Tour de Cécile Duquenne : Chronique + interview

latour

4e de couv’

Jessica, 16 ans, se réveille dans un marécage artificiel aux dangers bien réels. Très vite, elle comprend qu’elle se trouve au sous-sol d’une étrange tour sans fenêtres, et que le seul moyen d’en sortir est de monter jusqu’au toit. Accompagnée de quelques autres jeunes, elle se lance dans l’ascension de sa vie, explorant chaque niveau, affrontant les dangers embusqués…
Et les révélations.
Car Jessica n’a plus aucun souvenir d’avant son arrivée ici. Ils lui reviennent par bribes, étage après étage, et plus elle en apprend, moins elle désire sortir – surtout que son pire ennemi se trouve à l’intérieur avec elle. Bientôt, l’envie de se venger prend le pas sur l’envie de s’échapper…
Et si en exhumant les secrets de son passé, Jessica levait aussi le voile sur la véritable fonction de La Tour ?

Avis

Je dois dire que, lorsque Cécile m’a contacté pour me faire découvrir en avant-première son dernier bébé, je n’ai pas hésité fort longtemps. La coïncidence veut que je venais justement de finir la pétaradante et époustouflante saison 1 des Foulards Rouges, une saga qui bouscule joyeusement les codes & les genres, éditée dans la collection Snark chez Bragelonne. J’étais donc fort curieuse de découvrir ce que Miss Cécile nous avait mijoté !

Et on peut dire que je ne m’attendais vraiment pas à ce récit…

Jessica, une ado, se retrouve donc dans un marécage infesté de crocodiles à l’appétit plus qu’éveillé et sans aucun souvenir de ce qu’il lui est arrivé. Avec d’autres prisonniers, elle parvient à s’échapper via une trappe… pour se rendre compte qu’elle et ses compagnons d’infortune se trouvent enfermés dans une Tour pour le moins étrange. Qui les a enfermés là ? Dans quel but ?

Si ce pitch vous rappelle plusieurs productions récentes, sachez que la ressemblance s’arrête là. Car Cécile Duquenne joue très intelligemment sur deux tableaux : le suspense créé autour des prisonniers et celui tournant autour de leur identité & leur passé. J’ai été complètement happée par le portrait de Jessica, qui se révèle au fur et à mesure, celui d’une ado au passé trouble, qui en a bavé et qui s’en est sortie… Du moins, c’est ce que l’on pourrait penser.

Je ne vais pas trop spoiler, car cette novella mérite qu’on prenne pleinement plaisir à sa découverte, c’est un voyage éprouvant à plus d’un titre, libérateur aussi, et qui a le mérite de poser des questions plus que troublantes sur la justice, la rédemption et notre capacité à pardonner. Un récit à découvrir de toute urgence – et à ce prix-là, vous n’avez vraiment aucune excuse !

cecile_duquenne

Hello Cécile, merci d’avoir accepté cette invitation !

 Peux-tu te présenter en quelques mots ?

Avec plaisir ! Alors je m’appelle Cécile Duquenne, j’ai actuellement 27 ans, et je suis née et ai toujours vécu en Provence… ce qui explique peut-être la dominance « soleil » dans mes livres 😉

Je suis auteur, mais aussi traductrice freelance car il faut bien manger, et doctorante en littérature japonaise (ultra) contemporaine ; j’étudie les littératures post-Fukushima en France et au Japon.

Sinon, j’adore le thé (j’en bois des litres !!) et j’envisage d’ouvrir une secte, celle des AdoraTHEurs ! (oui, bon, je suis déjà dehors avec mon jeu de mots ^^)

 Tu passes avec bonheur d’un genre à l’autre, depuis le fantastique avec la série des Nécrophiles Anonymes jusqu’au western-space op’ des Foulards Rouges. On se demande où tu vas encore nous emmener dans tes prochaines créations… Une idée ?

Une idée, ou deux ou trois en fait 😉 Mais tout se place sous une seule et même bannière : le steampunk ! C’est un genre très polymorphe, facile à étirer et manipuler, j’adore m’amuser avec.

Ma prochaine publication sera donc du steampunk jeunesse (8-12 ans) qui va vous emmener dans un espace-temps clos où se trouvent le labyrinthe et le manoir d’Arsène Lupin, rien que ça ! Ça s’intitule Penny Cambriole et l’Horloge à voler le temps.

Sinon, je pose en ce moment les bases d’un one-shot steampunk, adulte/young-adult cette fois, qui devrait s’intituler L’Intemporel. Je ne peux guère en dire davantage, mais disons qu’on va plonger du côté magique de la force cuivrée… 😉

 Parlons un peu de la Tour, une novella qui m’a surprise à plus d’une reprise. Comment t’est venue l’idée de cette tour, d’abord, et de Jessica, ensuite ?

L’idée de la tour m’est venue suite au défi que je me suis lancé : écrire un roman (court) en 3 jours seulement. Pour cela, il me fallait absolument un lieu « facile » à explorer, avec une seule voie pour sortir, des épreuves au milieu… on a eu beaucoup de labyrinthes, de tunnels, d’arènes classiques… moi je voulais quelque chose d’intimiste et d’oppressant, et l’image d’une tour sans fenêtre m’est immédiatement apparue. En plus, un récit en huis-clos qui évolue à la verticale, du bas vers le haut et non l’inverse, ça se voit rarement ! L’idée m’a donc tout de suite séduite, et ni une ni deux, je me lançais à la découverte de cette tour… au sujet duquel je n’en dirai pas davantage afin d’éviter de gâcher la lecture comme la surprise à ceux qui nous lisent 😉

Quant à Jessica, la réponse est moins évidente… lorsque j’ai créé le personnage, j’étais comme elle au début du roman : sans éléments personnels auxquels me raccrocher. Il fallait que je trouve un moyen de la rendre attachante sans que le lecteur ne sache RIEN d’elle. Il fallait donc la faire parler et s’exprimer à travers des actes plutôt que des éléments de son passé. Elle apparaît donc d’entrée de jeu courageuse, le cœur sur la main, néanmoins méfiante sans qu’elle puisse savoir pourquoi… évidemment, je savais où j’allais en écrivant le roman, mais lorsque j’ai créé la fiche du personnage en amont, j’étais comme Jessica : je ne savais rien d’elle ni de ce que j’allais découvrir. Elle ne m’est pas apparue d’un seul bloc, comme c’est parfois le cas avec les personnages. Je suis allée à sa découverte, couche de souvenir après couche de souvenirs. Son passé s’est construit par strates, un peu comme elle le découvre dans la tour… mais oups, j’en ai déjà trop dit !! ^^

 Si je ne me trompe pas, tu es traductrice freelance. Comment organises-tu tes séances d’écriture ? Te faut-il une ambiance/un rituel en particulier pour te mettre à écrire ?

Oui, je traduis aussi, dans le domaine de la SF, fantasy, fantastique… et sous pseudo afin de séparer ces différentes activités 😉

Que ce soit pour l’écriture ou la traduction, le rituel est le même : je me fais un petit thé, ou une grenadine si vraiment il fait trop chaud et/ou qu’il est trop tard pour boire du thé, je mets de la musique, j’ouvre mon document… et j’écris. Rien de plus. Pas de formule magique, ni de mantra. Les Anglais disent : « Just get it done. » Du coup, je prends exemple sur eux et je me contente de me poser devant le PC pour écrire, sans tourner autour du pot. J’ai constaté que, pour moi, c’était ce qui marchait le mieux !

Après, j’ai du mal à écrire en groupe lors de rencontres entre auteurs, mais j’adore les word wars : du coup, je favorise souvent les chats entre auteurs lors des Nanowrimo ou Camp nano. Twitter est bien pour ça aussi… ce que tu sais, d’ailleurs 😉

 Un mot de la fin ?

Oui, au sujet des expériences, des paris un peu fous… comme un roman en trois jours autoédité par la suite. N’hésitez pas : foncez. On en apprend beaucoup sur soi-même, sur l’objet livre en lui-même, sur l’écriture et notre rapport à ce moyen d’expression poétique.

Surprenez-vous, désapprenez, réapprenez. Auteurs, hybridez-vous. Mais surtout… écrivez quoi qu’il en soit ! 😉

Site de l’auteur

You Look Disgusting – Vive la diversité

Il y a quelques jours, grâce à l’excellent site Madmoizelle, j’ai visionné cette vidéo d’une youtubeuse beauté, qui, pour s’être dévoilée sans maquillage à la caméra, s’est prise, de la part  de pas mal de personnes, des commentaires injurieux et blessants. « You look disgusting » – Tu es dégoûtante – ou encore « I can’t bear looking at you » – Je ne peux pas supporter ta vue – entre autres joyeusetés.

En regardant la vidéo, et ce même si vous ne comprenez pas l’anglais, vous pourrez aussi remarquer que cette jeune femme est aussi insultée quand elle se maquille – « false advertising » (publicité mensongère) n’en est qu’un exemple.

C’est un témoignage qui m’a énormément touchée, comme elle le ferait chez toute personne dotée d’un minimum d’empathie, mais aussi parce que moi-même, j’ai été victime de ce genre de harcèlement.

Aussi, aujourd’hui, ce sera un article plus intime que ce que vous avez l’habitude de lire sur ce blog, un coming-out nécessaire, je pense, car il est important pour moi d’apporter ma petite pierre à l’édifice en témoignant que oui, le harcèlement est toujours présent et que oui, il peut vous détruire. Et que non, personne n’a à le subir.

J’ai été harcelée au collège et au lycée pour quantité de raisons.

Parce que je ne suivais pas la mode.

Pour ma couleur de peau.

Pour mon prénom.

Pour mes cheveux.

Pour mes rondeurs.

Parce que je ne parlais pas aussi fort que les autres – ce qui m’a valu la jolie dénomination d’ antisociale.

Vous trouvez ça débile ? Moi aussi.

Mais c’est seulement après que l’on s’en rend compte. Sur le moment, quand vous êtes seule face à vos harceleurs, que cela se reproduit au quotidien, vous ne trouvez pas ça « débile » ou « stupide ». Ces mots que l’on vous lance à la tronche, jour après jour, finissent par vous coller à la peau. Ils s’immiscent dans votre esprit, corrompent votre estime de vous, faussent votre jugement. Vous finissez par vous dire « Si l’on me le dit aussi souvent, c’est que cela doit être vrai. » C’est une spirale infernale, destructrice, nocive pour vous comme pour votre entourage.

Je n’en ai jamais vraiment parlé jusqu’ici, parce qu’avec le harcèlement, vient aussi la honte. Honte d’en parler à haute voix, honte de se livrer à d’autres personnes, avec la peur au ventre qu’elles aussi finissent par vous dire que vos harceleurs ont raison.

J’ai survécu à cette époque, à ces années que je ne peux pas évoquer, que ce soit ici ou à voix haute, sans une boule au ventre. Même maintenant, 14 ans après avoir obtenu mon diplôme et être sortie de ce lycée sans un regard en arrière, trop contente de quitter cet univers, c’est un sujet que je n’aime pas évoquer.

Il y a des mots, des visages, des noms qu’on ne peut pas oublier. Et s’ils étaient jusqu’ici une blessure & le resteront, paradoxalement, aujourd’hui, j’en tire aussi de la force.

Ce qui m’a décidé à témoigner, outre la vidéo de cette jeune femme, c’est aussi ce que je vois de plus en plus sur Twitter & ailleurs, à savoir un courant d’air bienvenu, un mouvement d’opinion qui se bat pour changer les mentalités. Pour une société plus juste, plus tolérante également. Et, si je soutiens à ma manière cette vague que je trouve chaque jour plus fascinante, plus importante aussi, que ce soit ici ou sur les réseaux sociaux, il était temps, je pense, que je parle plus ouvertement de ce sujet.

Nous pouvons tous subir le harcèlement. Qu’il soit virtuel ou réel. Que nous soyons jeunes, vieux, grands, petits, minces, gros, que notre peau soit blanche ou pas, que nous portions n’importe quel prénom ou que nous soyons à la pointe de la mode ou pas.

Peu importe la raison pour laquelle on vous harcèle.

Car, en aucun cas, vos harceleurs n’ont raison.

Retenez bien ceci : ILS N’ONT PAS RAISON.

Le venin, qu’il soit dans les mots que vous entendez ou les commentaires que vous recevez, reste du venin. Ce n’est pas un miroir où vous trouverez un reflet fidèle de vous-même. Ce ne sont pas des ordres auxquels vous devez vous conformer, ni des instructions que vous devez suivre pour être plus heureux.

Cela reste des insultes. Des moqueries. Du mépris. Du dédain.

Une pile d’ordures.

Et vous savez ce que l’on fait avec des ordures ?

On les évacue et on les fait disparaître.

Aucune insulte, aucun mot violent, aucune raillerie ne peut vous empêcher d’être ce que vous êtes, ni d’accomplir ce que vous voulez faire. Vous, et vous seul, avez ce pouvoir.

La prochaine fois que vous vous regarderez dans un miroir, pensez à ceci.

La source de tout harcèlement, c’est cette représentation que l’on nous renvoie au quotidien, ces « canons de beauté », ces images grâce auxquelles un « on », aussi anonyme qu’omniprésent, fait pression sur nous pour que nous nous y conformions.

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Ceci vous rappelle-t-il quelque chose ? Et ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres…

Des images stéréotypées à l’extrême, qui sont pourtant toujours utilisées pour nous dire ce que nous devons penser, comment nous devons agir, ce que nous devons porter.

Tu ne corresponds pas à cette image ? Honte sur toi !

Et il n’y a pas que sur les panneaux publicitaires qu’on les rencontre.

Dans les films au cinéma, les séries à la TV ou encore dans nos lectures.

Je suis lassée, fatiguée, énervée aussi de voir souvent les mêmes types de personnages en tant qu’héros ou héroïne.

J’en ai assez que l’on me mette sous le nez des figures qui ne me correspondent pas. Auxquels je n’ai aucune chance de m’identifier, que ce soit maintenant ou quand j’étais ado.

Heureusement, comme je le disais plus haut, les choses changent. Et nous pouvons tous y contribuer.

Pour ma part, je veux des livres qui illustrent la diversité de notre société. Qu’on parle de personnages comme l’on pourrait en côtoyer dans la vie de tous les jours, qu’ils soient grands, gros, maigres, avec des boutons, des lunettes, qu’ils aient des accents, des appareils dentaires, qu’ils connaissent des problèmes, petits comme grands, des personnages auxquels j’aurais pu m’identifier ado. Auxquels une partie de moi-même peut toujours s’identifier, d’ailleurs.

Je veux des personnages qui bouleversent les idées reçues, qui ruent dans les brancards, qui mettent à bas les préjugés, qui me fassent voir le monde et la société où nous vivons différemment, qui me donnent de l’espoir, qui me fassent rire, pleurer, me fassent me souvenir de mes heures les plus sombres et qui me tendent la main pour mieux voir la lumière au bout du tunnel.

L’ado que j’ai été aurait adoré lire de tels livres. Je sais qu’elle les aurait lus avec une vague irrépressible d’amour dans son coeur, qu’elle aurait pleuré sur ces pages, qu’elle les aurait peut-être même serrés contre elle, une fois la lecture finie.

L’adulte que je suis aimerait toujours les lire.

Et l’auteur que je suis aussi les accueille à bras ouverts.

C’est un fait dont j’ai pris conscience, dans mon parcours d’écriture, une tendance qui s’affirme de plus en plus, c’est cette envie de prendre les histoires que j’entends autour de moi et de les tisser dans mes récits, de leur donner un nouvel éclairage, de mettre sous le feu des projecteurs des personnages qui, jusqu’ici, étaient plutôt habitués aux rôles de figurants, quand ils n’étaient pas oubliés au fond des cartons ou dans les placards.

J’ai envie d’intrigues qui explosent les frontières, dérangent et secouent.

C’est une volonté d’explorer, de se mettre dans la peau de quelqu’un d’autre et de raconter son parcours. Ses expériences.

Cette intention d’écriture ne sera pas toujours facile, mais c’est quelque chose que je me dois à moi-même, en tant que personne & auteur.

Quelque chose que je dois à tous ceux qui liront ces lignes et qui peut-être s’y reconnaîtront.

Enfin, je terminerai ce – plutôt long – post par vous dire que, si vous voulez des bouquins de ce type, parlant de la diversité et la mettant à l’honneur, (et pas seulement que des bouquins d’ailleurs !) voici quelques sources – outre ce blog et mon compte Twitter – où les trouver, VF comme VO :

Callioprofs

We Need Diverse Books

Comment tu t’habilles

Gay YA

Madmoizelle

Le brillant article de Lise Syven sur le harcèlement scolaire

Young Adult, I love you

Et enfin, cette liste de titres YA établie par l’auteur James Dawson, exclusivement en VO, tous reflétant une des facettes de la diversité

[Sur le grill] Jean-Sébastien Guillermou

Cette fois-ci, c’est le talentueux auteur de la saga Les Pirates de l’Escroc-Griffe qui se retrouve sur la sellette !

pirates

Hello Jean-Sébastien, merci d’avoir accepté cette invitation ! Pour commencer, peux-tu te présenter en quelques mots ?

Bonjour Cindy, merci à toi de m’inviter ! Difficile de me présenter, au collège, j’étais considéré comme un geek car je m’intéressais aux jeux de rôle, j’adorais l’informatique et je lisais assidument Tolkien. Par la suite, j’ai étudié l’archéologie et l’Histoire, que j’ai enseignée avant de me consacrer à l’écriture.

Le premier tome de ta saga, Les Pirates de l’Escroc-Griffe, vient d’être publié chez Bragelonne dans la collection Snark (avec une merveilleuse couverture, d’ailleurs !) Quelles ont été tes principales sources d’inspiration pour ce roman ?

Merci pour la couverture, j’ai une anecdote rigolote à ce propos : j’ai découvert les livres Bragelonne l’année 2000, en me baladant dans une FNAC. À l’époque, j’avais eu un tel coup de cœur pour ces couvertures magnifiques que je me suis dit « si un jour tu arrives à écrire un roman de fantasy et à être publié, il faut que ce soit chez ce nouvel éditeur ». J’étais à mille lieux d’imaginer que mon rêve allait se réaliser quinze ans plus tard !

Pour répondre à ta question, je pense que ce roman est en partie inspiré de mes voyages au Japon, en Jordanie et dans d’autres pays. Comme j’ai grandi dans les années 80-90, j’ai également été bercé par la littérature fantasy, bien sûr, mais aussi le cinéma de genre, notamment les Aventures du baron de Münchausen de Terry Gilliam. Je cite ce film car j’ai toujours eu une tendresse particulière pour les anti-héros, les personnages malmenés par la vie, ils m’intéressent bien plus que les héros classiques.

J’ai eu la chance de le lire en avant-première (oui, vous pouvez être jaloux ^^ ) et je dois dire que ce qui m’a frappée en premier lieu dans ton œuvre, c’est le foisonnement de ton imagination ! J’imagine que tu es loin d’en avoir fini avec ces Pirates, n’est-ce pas ?

Effectivement ! J’ai choisi le format d’une trilogie car bien que mon univers soit assez grand, mes pirates ont le don de ne pas rester en place. Ils n’ont pas fini d’affronter des dangers… et les Mers Turquoises recèlent encore bien des mystères. La bonne nouvelle, c’est que le lecteur n’aura pas à attendre des années car les trois tomes vont être publiés en 2015.

Tu viens d’effectuer plusieurs séances de dédicace, notamment chez plusieurs points Fnac un peu partout en France. Ton ressenti sur ces premiers contacts avec ton public ?

C’est très émouvant d’échanger avec des lecteurs qui vous annoncent qu’ils ont un coup de cœur pour des personnages imaginaires. J’ai passé des années sur cette trilogie, mais rien que pour ces moments, ça valait le coup d’écrire ces trois tomes !

js_guillermou

Le mot de la fin ?

Tout finit dans le Maelström.

Vous pouvez retrouver l’auteur – et en savoir plus sur l’univers des Pirates ! – sur son site

Vos questions sur l’écriture et le métier d’auteur : quatrième round !

Avant de commencer cette 4e séance Q/R, plusieurs petits apartés.

  • D’abord, pour tirer au sort le défi d’écriture Wattpad ! J’ai pris un peu de retard pour le clôturer, la semaine ayant été chargée, mais sans plus de retard, le voici :

pourquoi pas un extrait de la vie d’un arbre multi centenaire, dernier représentant de son espèce dans un monde de plus en plus bétonné et urbanisé ?

Merci à Miss Shana Lewis pour cette jolie idée ! Rendez-vous après le mois de juillet pour découvrir ce texte que je posterai bien entendu sur Wattpad.

  • Pourquoi après le mois de juillet, me direz-vous ? (Admirez l’enchaînement)

… Parce que j’ai décidé  – en dernière minute, comme d’hab – de me lancer dans le Camp NaNoWriMo !

Article à venir sur le sujet, si j’arrive à le caser avant les vacances.

  • Et j’en viens donc à la troisième nouvelle, à savoir que ce blog prendra ses vacances annuelles du 17 juillet au 17 août ! Ce qui ne signifie pas que je ne communiquerai plus sur les réseaux sociaux, loin de là 😉

Revenons donc à vos questions et en particulier, à celle de la semaine dernière, à laquelle je n’avais pas fini de répondre.

  • Bonjour, ce qui m’intrigue c’est l’après écriture, une fois que le livre est terminé comment se passe le contact éditeur, le choix aussi de la maison d’édition à qui vous avez envie de faire confiance (bien que ce ne doit pas être aussi simple que ça), le travail de correction et/où réécriture si besoin il y a, le choix de la maquette pour la couverture, de l’artiste si il y a une illustration ou photo-montage et surtout dans quelle mesure l’auteur a-il voix dans ces différents travaux ?

La première partie de ma réponse, pour rappel

Pour les corrections/réécriture : autant être claire dès le départ, il y en aura toujours !  Ce qui ne veut pas dire que votre texte soit nul, bien entendu. Si un éditeur parie dessus, vous pouvez déjà être certain qu’il y a du potentiel. Le tout, c’est que ce potentiel puisse ressortir au maximum. C’est là qu’un avis professionnel est déterminant, non seulement pour votre texte, mais aussi pour vous, votre carrière d’écrivain. Nous ne sommes plus à l’ère de Cyrano, dont le « sang se coagule à l’idée qu’on change la moindre virgule » – même s’il s’agit d’une de mes pièces préférées, dans la pratique, ce point de vue vous mènera droit dans le mur.

Comment cela se passe ?

Les corrections résultent d’abord d’une discussion franche avec votre éditeur. Jouez cartes sur table et surtout, soyez ouvert. Vous avez des questions, des remarques, des suggestions ? Posez-les. Et considérez aussi le point de vue de votre interlocuteur. En un mot, soyez professionnel.

Quand vous vous êtes mis d’accord sur les changements à effectuer, vous bénéficiez aussi d’un certain délai pour les effectuer. Tenez aussi en compte que vous voudrez peut-être relire votre texte avant de le renvoyer.

Certaines phases de correction, notamment celles d’ortho-typo, peuvent aussi se dérouler sans que vous deviez intervenir. L’éditeur confie alors le texte à un correcteur professionnel, qui se chargera de débusquer les coquilles et autres joyeusetés dans vos phrases.

Cette phase de correction/relecture est à différencier de ce qu’on appelle la relecture du BAT (comprenez le Bon A Tirer) et qui, elle, constitue la dernière phase de relecture finale avant que le texte ne soit envoyé à l’imprimeur. Autant vous dire que vous devrez faire preuve de pas mal d’attention durant cette phase !

Pour la couverture : voilà une question qui m’a souvent été posée (on se demande pourquoi 😉 )

Je vais peut-être en choquer certain(e)s, mais l’auteur n’a que rarement son mot à dire en la matière. Pourquoi ? Parce qu’il s’agit d’un des privilèges de l’éditeur, qui s’appuie sur son expertise du marché littéraire pour créer la couverture qui, pour lui, attirera davantage l’oeil du futur lecteur quand ce dernier flâne dans les rayons et/ou surfe sur le Web. La couverture sera aussi en harmonie avec la ligne générale de la collection/maison d’édition.

(Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit, nous sommes bien d’accord que toutes les couvertures ne sont pas des réussites…)

(Tous les éditeurs n’appliquent pas ce système et je vous invite d’ailleurs à lire cet excellent article de Miss Flora à ce sujet !)

Personnellement, Gulf Stream m’a demandé mon avis en ce qui concerne les maquettes des Outrepasseurs (dont les trois couvertures ont d’ailleurs été créées en un seul bloc). Et puis, honnêtement, quand j’ai vu ces beautés, je me suis dit que non seulement, je n’aurais pas pu en créer de plus jolies, mais qu’en plus, elles correspondent parfaitement à l’esprit de la saga.

Outrepasseurs_ensemble_2

Juste pour le plaisir… 😉

Rendez-vous la semaine prochaine pour une nouvelle session questions/réponses !

Et si des interrogations sur l’écriture & le métier d’auteur vous brûlent les lèvres, laissez-les donc en commentaire 😉