Exceptionnellement, today, c’est le rendez-vous lecture de la semaine. Et comme je suis d’humeur généreuse, ce sera donc deux bouquins au menu !
Le premier est Sweet Sixteen d’Annelise Heurtier, paru récemment en poche chez Casterman Jeunesse.
Quatrième de couv’
RENTRÉE 1957.
Le plus prestigieux lycée de l’Arkansas ouvre pour la première fois ses portes à des étudiants noirs.
Ils sont neuf à tenter l’aventure.
Ils sont deux mille cinq cents, prêts à tout pour les en empêcher.
Mon avis
J’ai lu ce bouquin avec les copines du Whatsapp Book Club et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il a suscité quelques discussions passionnées entre nous! Je mettrai les liens au fur et à mesure. Pour ma part, j’a vraiment apprécié la lecture, elle m’a beaucoup marquée. Même si je savais plus ou moins à quoi m’attendre – la ségrégation raciale aux States ayant fait l’objet de plusieurs adaptations ciné, comme le magnifique « La couleur des sentiments » – la violence décrite dans le roman, le rejet, le racisme, mais aussi la tolérance et l’espoir d’un avenir meilleur, toutes ces émotions si bien décrites dans le roman m’ont fait l’effet d’un vrai coup de poing. Certains passages sont à glacer le sang, comme celui-ci:
« Molly réfléchissait au moyen d’alerter discrètement des secours quand une voix lui glaça le sang:
– Deux négresses! Deux négresses dans la ruelle !
Un peu plus loin, un homme pointait son index droit sur elles. Son doigt paraissait démesurément long.
– Cours Molly, cours! cria sa mère en se débarrassant des ses chaussures. A la voiture! »
Quand on sait que l’histoire s’inspire de faits réels…
L’auteur exprime avec talent le point de vue de Molly, une des sept jeunes gens appelés à étudier dans un lycée jusque là réservé aux Blancs et situé en Arkansas. Mais on suit également le point de vue de Grace, jeune fille blanche, élevée par sa nounou noire et qui songe davantage à flirter avec le frère d’une de ses amies qu’aux bouleversements qui secouent son lycée. Et pourtant, ces deux jeunes filles vont être prises dans la tourmente qui va s’abattre sur leur ville. Ce qui m’a beaucoup plu dans ce court roman – un peu plus de 200 pages – c’est que l’auteur ne pose jamais de jugement, ni ne favorise un personnage au détriment de l’autre. Les dialogues sonnent vrais, les jeunes gens sont bien campés et je salue le travail de l’auteur en ce qui concerne la reconstitution historique.
Cerise sur le gâteau : l’explication concernant les sept jeunes gens, qui ont réellement existé et ce qu’il est advenu d’eux par la suite. Un bel hommage. C’est aussi un portrait fidèle d’une époque qui peut nous sembler si lointaine, alors que ces évènements se sont passés en 1957.
Le second bouquin – et c’est un gros coup de coeur ! – c’est Aristotle and Dante discover the secrets of the universe par Benjamin Alire Saenz.
Quatrième de couv’
Aristotle is an angry teen with a brother in prison. Dante is a know-it-all who has an unusual way of looking at the world. When the two meet at the swimming pool, they seem to have nothing in common. But as the loners start spending time together, they discover that they share a special friendship—the kind that changes lives and lasts a lifetime. And it is through this friendship that Ari and Dante will learn the most important truths about themselves and the kind of people they want to be.
Mon avis
Le genre de roman dont il est difficile, voire impossible, de dire à quel point il est formidable ! Et pourtant, l’enchantement n’a pas pris dès la première page. Nous avons donc le point de vue d’Ari (Angel Aristotle, mais avec un nom pareil, on comprend qu’il préfère utiliser le diminutif d’Ari), jeune homme de seize ans d’origine Mexicaine, qui vit avec son père encore traumatisé par la guerre de Vietnam (nous sommes en 1987) et sa mère, un esprit pratique mais qui a été fragilisé par l’emprisonnement de son fils aîné, Bernardo, des années auparavant. Ari est le petit dernier de la famille, il lui est difficile d’établir un contact avec ses soeurs plus âgées, qui ont charge de famille, quant à son frère personne n’en parle plus depuis qu’il a été emprisonné. Une absence qui semble parfois étouffante pour le jeune homme, qui ne compte guère d’amis. Jusqu’au jour où il rencontre Dante à la piscine. C’est un été tumultueux qui s’offre à eux, un été aussi doux qu’amer, synonyme de réflexions et d’évolutions…
Comme je le disais plus haut, je n’ai pas été séduite dès la première page et j’ai même posé le livre pour achever une autre lecture avant de le reprendre. Néanmoins, quand je l’ai repris, je ne l’ai plus lâché. Avec un style simple, très abordable et qui se révèle en même temps très poétique, d’une terrible sensibilité, l’auteur nous conte le chemin d’Ari et de Dante, de leurs familles et de leurs amis aussi, tout au long de cet été. Ma première impression quand j’ai refermé ce livre, c’est qu’il est d’une incroyable pureté, aussi limpide et cristallin qu’une source, quand il nous livre les sentiments bruts, les émotions à vif d’Ari et de Dante. Ici, point de grands moments bouleversants ou d’action trépidante, mais un récit qui vous emporte doucement dans ses méandres, qui vous touche petit à petit, jusqu’à vous submerger complètement, sans rien perdre de sa douceur ni de sa justesse. Un récit magique, mais qui ne perd jamais de vue la réalité des choses, qui dénonce à sa manière le racisme dans toutes ses formes.
C’est aussi un récit d’amour, un amour qui vibre à chacune de ses pages, l’amour entre amis, entre les enfants et les parents et aussi entre les amants. Un amour qui brille doucement, sans grande déclaration, mais qui n’en est pas moins bien réel et tangible. Inutile de vous dire que j’ai été complètement chamboulée, émue, en larmes aussi, par ce roman, qui est juste une véritable petite merveille. L’auteur est un grand conteur, quelqu’un qui ne se pose jamais de jugement pas plus qu’il n’offre de réponse toute faite aux questions que se posent Ari et les autres personnages, quelqu’un qui offre des portraits attachants et vrais et en particulier de l’adolescence, avec sa colère, ses questions, ses bouleversements. Un roman qui m’a touché au coeur et dont je me souviendrai encore longtemps !
Petite note pour ceux qui ne liraient pas l’anglais : d’après le site de l’auteur, les droits ont bien été achetés pour une traduction en français, mais malheureusement, je n’ai pas plus d’infos quant à une prochaine sortie. Si quelqu’un en a…
Je vous laisse sur cet extrait:
» – Are we going to be friends ?
« Don’t be crazy, Dante. We are friends. »
« Will we always be friends ? »
« Always »
« I’ll never lie to yo about anything, » he said.
« I might lie to you, » I said. And then we laughed. And I thought, Maybe this will be the summer when there is nothing but laughter. Maybe this will be the summer. »