Une fois n’est pas coutume, j’ai suffisamment d’inspiration pour vous écrire un article sur ce blog (je sais, ça fait un bail).
Et une fois n’est pas coutume non plus, ce sont les Oscars hollywoodiens qui m’ont mis le pied à l’étrier. Si vous ne le saviez pas, dans la nuit de dimanche à lundi, tout le gratin hollywoodien était donc réuni for the event of the year, aux célèbres statuettes dorées. Et non, je n’étais pas collée devant la TV – à vrai dire, j’ai regardé une seule fois les Oscars en direct (enfin en partie !) quand LOTR3 Le retour du Roi s’est retrouvé nominé à je ne sais plus combien de reprises. C’est vous dire si je ne suis pas spécialement fan de l’évènement.
Mais cette année, cependant, on peut dire que les nominations avaient attiré mon attention. Pour des nominations qui ont trop souvent été décriées comme trop blancs (et je ne donne absolument pas tort aux détracteurs/détractrices, loin de là) voir des acteurs & actrices comme Mahershala Ali & Viola Davis parmi les nominé-e-s ou encore des films comme Moonlight & Hidden Figures susceptibles de remporter une statuette, c’était un changement plus que bienvenu, surtout quelques semaines après l’investiture de Trump.
Et si je croisais les doigts pour que tous et toutes remportent le succès remporté, je ne m’attendais pas pour autant à ce que cela se réalise (surtout pour Moonlight – best Movie et dans des circonstances aussi rocambolesques.)
Mais le plus important ne se situe pas dans la gaffe qui a eu lieu sur scène ;
L’important se situe dans les mots, dans les expressions, dans les regards de ceux et celles qui, le premier moment d’incrédulité passé, ont monté les quelques marches et se sont retrouvés avec la récompense suprême entre les mains. Bien plus qu’objet à poser sur la cheminée (du moins j’imagine ^^ ) c’est la consécration, c’est la reconnaissance du travail accompli.
Et, surtout à l’époque où nous vivons, c’est l’affermissement d’un droit – celui d’être vu ET entendu. Celui de se dire et de dire tout court aux autres « Je suis à ma place ».
« Je suis sur le devant de la scène, moi qu’on a trop souvent relégué en second rôle, quand ce n’était pas en coulisses, et j’emmerde celleux que cela gêne. »

Mahershala Ali accepts the award for best actor in a supporting role for « Moonlight » at the Oscars on Sunday, Feb. 26, 2017, at the Dolby Theatre in Los Angeles. (Photo by Chris Pizzello/Invision/AP)
Si j’écris cet article, ce n’est pas seulement pour saluer la victoire de ces acteurs et de ces films. C’est aussi parce que ces victoires me touchent et me parlent sur un plan personnel.
En tant qu’auteur et en tant qu’être humain.
Auteur d’abord, car mes deux sorties 2017, que ce soit Ferenusia ou Ce soir, le ciel nous appartient, vont mettre en scène, chacune à leur manière, des personnages que j’ai rarement eu l’occasion de voir figurer dans des romans, si pas jamais.
Être humain ensuite, car je m’avoue volontiers lassée par la plupart des médias & divertissements culturels qu’on peut nous proposer. Comme si on me proposait chaque fois le même format, les mêmes caractéristiques, les mêmes cloisons, les mêmes cadres également dans lesquels je n’entre plus.
Je refuse d’y entrer en fait.
C’est même plus que ça – je ne peux plus ne pas voir ce qui se trouve en face de moi et qui ne va pas.
Ce qui cloche – alors que ça me semblait si normal auparavant.
Que ce soit une remarque grossophobe sous couvert d’une blague ciblant les gros-se-s, l’absence criante d’acteurs/d’actrices racisé-e-s dans les films et autres séries ou encore l’obligation vestimentaire pour l’immense majorité des actrices de porter jupe/talons aiguilles (et je pourrais continuer longtemps dans cette veine), ce sont là autant de détails qui me passaient sous le nez auparavant et que je ne peux plus ne plus voir à présent.
Une évolution qui s’est faite au fil du temps, au fil des rencontres également et qui ne cesse pas de s’affiner.
Ce qui nourrit ma lassitude, ma colère aussi, mon désenchantement se muant en indifférence blasée vis-à-vis de ces médias. S’ils ne me prennent pas en compte, ne reconnaissent pas la réalité de personnes qui, comme moi, ne rentrent pas dans leurs petites cases, pourquoi devrais-je, moi, les prendre en compte ? M’intéresser à ce qu’ils peuvent me proposer ?
Et il en va de même pour les autres produits culturels – au premier rang d’entre eux, les livres.
Voilà aussi et surtout pourquoi des voix comme celles de Yaa Gyasi, Léonora Miano, Meredith Russo, Jeff Garvin et encore bien d’autres parviennent à me captiver. Pourquoi je m’intéresse à leurs récits.
Parce que leur réalité, comme la mienne, ne s’articule pas autour du pôle qu’on nous ressert si souvent dans les fictions.
Parce que leurs personnages sont différents – comme j’ai envie que les miens soient différents.
Parce qu’ils parlent du monde d’hier et d’aujourd’hui – ou tout au moins une version qu’on ne retrouvera pas dans la plupart des livres d’histoire/journaux actuels.
Aussi et surtout parce que leurs récits me parlent. Me font du bien.
Et qu’en tant qu’auteur, j’espère pouvoir faire de même pour celleux qui me liront.
Voilà pourquoi les victoires de Viola Davis, Mahershala Ali et Moonlight m’ont donné un sourire aussi large que ceux qui se sont inscrits sur leurs visages hier soir.
Voilà pourquoi, en voyant les photos, les vidéos, en écoutant leurs discours, un sentiment de fierté m’a aussi gonflé la poitrine.
Et voilà pourquoi j’ai l’espoir que ces succès encourageront d’autres à créer, rêver, inspirer et – qui sait ? – eux aussi, monter sur le devant de la scène pour crier « J’existe. J’ai le droit d’être ici devant vous. Et je vais cesser de me taire. »