Station Eleven – Emily St John Mandel

Si vous suivez ce blog depuis quelque temps, vous avez pu remarquer que je parle moins souvent de mes lectures. Non pas qu’elles ne soient pas intéressantes (ah ah) ou que l’envie d’en causer me manque (ceux qui me suivent sur les réseaux sociaux en savent quelque chose), mais j’ai délaissé les bilans mensuels et autres rendez-vous, pour garder le meilleur, aka les bouquins qui me restent dans la tête bien après que j’ai tourné la dernière page.

Si vous ne l’avez pas compris, le coup de coeur est donc au menu !

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4e de couv’ 

Kirsten Raymonde will never forget the night Arthur Leander, the famous Hollywood actor, had a heart attack on stage during a production of King Lear. That was the night when a devastating flu pandemic arrived in the city, and within weeks, civilization as we know it came to an end.

Twenty years later, Kirsten moves between the settlements of the altered world with a small troupe of actors and musicians. They call themselves The Traveling Symphony, and they have dedicated themselves to keeping the remnants of art and humanity alive. But when they arrive in St. Deborah by the Water, they encounter a violent prophet who will threaten the tiny band’s existence. And as the story takes off, moving back and forth in time, and vividly depicting life before and after the pandemic, the strange twist of fate that connects them all will be revealed.

Mon avis

Un mot d’abord sur ce résumé – oubliez-le. Non pas qu’il soit incorrect ou qu’il induise en erreur, c’est juste que ce roman ne peut pas se limiter à la seule histoire de Kirsten, aussi intéressante soit-elle.

Parce que commencer Station Eleven – pour le moment, malheureusement, pas encore traduit en français – c’est accepter de se perdre dans un labyrinthe aussi fantasmagorique qu’humain, où règne une ambiance crépusculaire, tour à tour violente, euphorique et pleine d’espoir.

J’ai acheté ce roman sur un coup de tête – et aussi parce qu’il était en promo, le portefeuille a apprécié. J’en avais entendu pas mal parler, et en plus, c’est du post-apo – une de mes cames littéraires favorites. Ca partait plutôt bien. J’étais loin, très loin, de m’attendre à ce qui allait suivre !

L’intrigue s’ouvre donc sur une représentation du Roi Lear, interprété par un acteur à la gloire vieillissante, Arthur. Et la soirée tourne plutôt mal pour Arthur, car le voilà en train de faire une crise cardiaque sur scène. Un secouriste présent dans l’assemblée, Jarvan, accourt pour tenter de le sauver, mais peine perdue. La neige commence à tomber, les ambulances arrivent pour embarquer le corps et Jarvan, encore choqué par son aventure, reçoit le coup de fil d’un de ses amis, spécialiste des maladies infectieuses dans un hôpital non loin. La Georgian Flu, une grippe extrêmement agressive, a débarqué sur le continent américain. Tous ignorent qu’en l’espace de deux semaines, 90% de la population mondiale sera décimée…

Vous vous dites que cette mise en bouche a un air de déjà vu ?

Vous vous attendez à un récit post-apo classique, où une héroïne/petit groupe de jeunes gens vont devoir se battre dans un univers devenu hostile pour sauver les survivants ?

C’est là que vous avez tort.

Si vous commencez Station Eleven en pensant que vous allez en prendre plein la vue, avec courses-poursuite et explosions à la clef, vous risquez d’être déçus. Station Eleven est avant tout un roman à tiroirs, une palette de points de vue, chacun ayant son importance, son fil rouge dans la grande trame du récit. Que ce soit Arthur, sa carrière d’acteur, ses aspirations de jeune homme peu à peu en conflit avec ses contraintes pros et privées; Miranda, sa première femme, qui trouve son épanouissement dans son travail après s’être échappée du moule hollywoodien; Kirsten, jeune femme qui voyage dans une Amérique quasi déserte, avec la Travelling Symphony, mi-compagnie de théâtre, mi-groupe de musique ambulant, qui réintroduit, le temps d’une représentation, l’ancien monde dans cet univers irrémédiablement changé, tous ont leur rôle à jouer. Leurs vies se croisent, s’entrecroisent, entrent en collision, tournant en orbite d’un ancien aéroport et son mystérieux Musée de l’Homme…

Comme je le disais plus haut, Station Eleven a cette atmosphère étrange, particulière, qui m’a peu à peu complètement captivé; Entre description d’un monde perdu – même si certains se battent pour y introduire à nouveau une technologie rudimentaire – et nouveaux modes de vie – j’ai adoré par exemple tous les passages concernant la Travelling Symphony et la solidarité qui lie ses membres les uns aux autres, même quand ils tombent dans le piège tendu par le Prophète – une ambiance crépusculaire, poétique aussi, avec une patte, un style, un cachet qui sert merveilleusement bien l’intrigue.

L’auteur a ce sens de l’humain, ce conflit que nous éprouvons toujours entre attachement aux choses passées, la nostalgie des jours meilleurs – ou simplement différents – et cet espoir, cette envie qui nous pousse en avant. Mention spéciale au personnage de Clarke, cet humaniste qui s’ignore et fondateur de l’étrange musée – un récit qui m’a énormément touchée.

Je pourrais comparer, si besoin en était, Station Eleven à des films comme Children of Men ou encore Melancholia , mais je préfère vous recommander un voyage, à nul autre semblable. Prenez le risque et découvrez donc Station Eleven !

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